L’exemple lillois pour franchir un cap

Lille, cette saison plus qu’une autre, c’est l’exemple. Le vilain, c’est le petit canard SRFC, calimero parfait de cette saison étrange. Le vilain c’est aussi moi, car tout filou que je suis, je trouve que Lille est un excellent modèle mais que c’est aussi le plus mauvais calque de comparaison possible pour étalonner notre exposition aux blessures. C’est un mauvais exemple, Lille.

Lille a peu de blessés, certes, mais les joueurs de cet effectif tournent beaucoup. En effet, 18 de leurs joueurs ont joué plus de 10 matchs, et ces 18 joueurs ont tous eu plus de 5 titularisations, je n’ai pas compté Mouko, Lyng, Souaré, Wade et Vandam qui ont joué un peu moins que ça. Et quand cet effectif tourne, il y a maintien global du niveau de performances de l’équipe. Pourquoi ? Et bien parce que c’est une équipe qui se connaît parfaitement bien, qui se connaît même nettement mieux que les Marseillais ou les Lyonnais. Avec Rennes, la comparaison a encore moins de sens tant nombre de nos joueurs se découvrent eux-mêmes dans ce championnat et se découvrent entre eux.

En outre, les Lillois n’ont perdu qu’extrêmement peu de joueurs aux derniers mercatos. Quand ils l’ont fait, c’était principalement des transferts de joueurs peu employés. Cet été, ils n’ont d’ailleurs fait venir que deux nouveaux joueurs d’importance immédiate qui sont Moussa Sow et David Rozehnal. Et encore, pour ce dernier, on compte bien 24 participations mais seulement 10 titularisations. Quant à Sow, il arrivait avec 2 ans d’expérience de la Ligue 1, rien à voir avec un Brahimi, un Kana-Biyik ou même un Montaño qui jouait encore en Ligue 2 en 2008-2009.

Lille : un groupe expérimenté et qui se connaît

Cette expérience est très importante au LOSC qui n’est pas une équipe toute jeune. Idrissa Gueye découvre la L1 à 21 ans, Hazard n’a que 20 ans et Gervinho 23, mais ces deux là n’en sont pas à leur première saison. Et TOUS les autres titulaires réguliers de cette équipe ont 25 ans ou plus (Même Mavuba qui fait plus jeune que son âge a déjà 27 ans). Ce double effet (groupe qui se connaît + grosse expérience) a plusieurs impacts très importants :

  1. Ce groupe n’a plus besoin de travailler autant que le groupe rennais à l’entraînement, les automatismes sont déjà là, les expériences sont acquises et depuis un bon moment. La nature de ce travail à l’entraînement ainsi que la charge de ce travail sont extrêmement différents.
  2. Ce groupe sait se trouver plus facilement sur le terrain, cela génère nettement moins d’efforts « dans le vide » qui sont très usants moralement, mais aussi physiquement car tout engagement physique inefficace qui ne permette pas de gagner ou de contrôler les matchs pousse à s’arracher plus pour obtenir un résultat.
  3. Ce groupe constitué de joueurs expérimentés sait nettement mieux gérer ses efforts au cours d’une rencontre. Et ce point compte énormément. Un Dalmat, un Douchez ou un Leroy, ça se blesse moins souvent qu’un Kembo, qu’un Brahimi ou qu’un Camara. Alors bien sûr ces exemples ne sont pas hyper pertinents parce que les caractéristiques physiques sont très différentes d’un joueur à l’autre, mais la gestion des efforts en compétition reste un apprentissage MAJEUR du développement d’un sportif.
  4. Cette rotation permet à quelques joueurs de souffler sans que l’équipe perde son niveau. Le groupe n’a pas à compenser autant les fluctuations de niveau lors des remplacements. A Rennes la compensation se fait par un redoublement d’efforts, qu’ils soient physiques ou de concentration, de la part des titulaires qui font tout le match. Et cela finit par user tout le monde et même les plus solides (Mangane, Danzé ou même M’Vila).

Cela fait donc pour moi quatre points très importants qui distinguent notre groupe de celui de Lille et expliquent en partie, voire peut-être en grande partie, notre exposition plus importante aux blessures. Quand je dis que Lille est un mauvais exemple de comparaison à ce sujet, je le fais évidemment par provocation, je suis un filou je vous dis, mais je le fais surtout pour mieux souligner ces points de différenciation primordiaux et qu’on arrête de juger le SRFC avec la même loupe que d’autres clubs. J’espère que vous l’avez bien compris.

En revanche, sur le plan de la politique sportive, je trouve que Lille est le tout meilleur modèle du championnat. Et j’irais même plus loin : C’est pour moi le SEUL club du championnat qui, toutes proportions gardées, a une politique sportive qui tient la comparaison avec celle du Barça ou de Manchester United.

Il y a 3 ou 4 ans, alors que ce club connaissait une phase de transition, notamment au niveau de certains résultats, ils ont démarré en douceur un nouveau cycle sportif en prenant conscience qu’en plus d’un solide vivier de jeunes talents parmi leurs titulaires (dont Béria, Dumont, Plestan, etc.), ils avaient quelques générations émergentes dont pouvaient sortir d’excellents joueurs. Il s’agissait en particulier de joueurs comme Debuchy, Franquart, Fauvergue ou Cabaye autour de qui ils ont construit progressivement en faisant venir des joueurs d’une même génération qui pouvaient s’intégrer à ce groupe et se développer avec eux. C’est là que sont arrivés Rami, Bastos puis l’année d’après Chedjou, Emerson, Obraniak… Et puis, même s’ils n’ont pu conserver tout le monde pour diverses raisons, ils ont continué à construire autour de ce noyau de joueurs nés disons entre 83 et 88. Encore cette année, leur principale recrue, Moussa Sow, est de la génération des Rami, Cabaye, Chedjou, Emerson et Debuchy qui n’ont qu’un an de moins qu’Obraniak et De Melo, deux ans de moins que Mavuba ou Béria, etc.

Ces joueurs ont comme appui supplémentaire quelques collègues encore plus expérimentés, et sont poussés par quelques jeunes de très grand talent qui sont incorporés petit à petit à cette ossature d’équipe au fil des demi-saisons. C’est le cas d’Hazard ou de Gervinho et même d’Idrissa Gueye qui connaît cette saison les premières phases d’incorporation à ce groupe.

Ils ont réussi à inscrire à leur projet sur une durée finalement peu commune dans ce championnat (avec des contrats ou renouvellements de 3, 4 voire parfois 5 ou 6 ans), et avec de nombreux joueurs façonnés aux exigences de la L1 comme aux spécificités du club, rodés les uns aux autres et habitués à une certaine organisation sur le terrain. C’est la cohérence fabuleuse de cette politique sportive qui leur permet d’être aussi performants cette saison.

Le Stade Rennais à l’aube d’un cap

J’ai le sentiment qu’à Rennes, on essaie depuis longtemps de mettre en place une politique similaire. Seulement, notre passé trébuchant, notre manque relatif (car il y a bien pire que nous) de stabilité interne avec un peu trop d’entraîneurs ne s’engageant pas sur une construction sur le long terme ainsi qu’un manifeste manque de moyens financiers, tout cela ne nous a pas permis de mettre en place une telle continuité. Et sur ce dernier point, il y a des effets de palmarès, des effets de taille – Lille a une population alentour qui dépasse le million d’habitants, Rennes n’aura jamais un tel potentiel démographique, ni un tel potentiel de sponsors qui en découle, ni un tel potentiel de subventions également – et des effets de résultats – rétribution des droits télévisuels en fonction du classement – qui nous ont beaucoup freiné.

On n’a pas pu retenir autant de joueurs qu’espéré saison après saison. Cependant, les choses s’améliorent ! On a déjà su conserver des Danzé, Lemoine, Marveaux, Kembo, (Briand) etc. C’est-à-dire des jeunes qu’on n’arrivait pas à retenir autant les années précédentes. A ces joueurs là, on a cherché à incorporer d’autres talents de générations proches comme Tettey, Gyan, Bangoura, Montaño, Apam ou légèrement supérieures tels Fanni, Mangane ou Douchez. Avec pour encadrement additionnel quelques joueurs bien plus expérimentés dont Leroy et Dalmat sont les derniers exemples après le départ d’Hansson ou la retraite de Pagis. Enfin, on a intégré quelques talents amenés à briller à leur tour dans les années à venir mais qui n’étaient certainement pas tous destinés à avoir tant d’exposition dès cette saison. Cela ressemble à un début de structuration d’équipe à la Lilloise, seulement…

Cet été, il n’était pas prévu que Marveaux redevienne si fragile, qu’Apam n’arrive pas à se rétablir d’une opération qui paraissait quasiment bénigne, que Kembo se blesse autant, que Lemoine frôle la mort ou la paralysie…. Cela nous a obligés à lancer Brahimi plus tôt et plus fréquemment que prévu, à lancer un Doumbia qui n’était pas a priori parti pour avoir la moindre titularisation, à lancer un Kana-Biyik qui ne partait que remplaçant, à lancer Jebbour qui ne devait peut-être jouer qu’en CFA, à lancer Camara qui passait normalement après Kembo, Marveaux et même Brahimi…

Mais tout n’est pas sombre pour l’avenir. En effet, parmi tous ces jeunes et quelques « un peu moins jeunes », un bon nombre s’est déjà inscrit dans une certaine durée en signant ou prolongeant sur plus de deux saisons. La majorité de nos contrats se terminent en 2014, quelques autres en 2013 et les deux derniers arrivés peuvent même être là jusqu’en 2015. On a également un entraîneur qui fera au moins une 3e année à Rennes pour la première fois depuis Bölöni. Ce dernier est parti quand, en parallèle, les Lillois démarraient leur restructuration sportive et il faisait déjà figure d’exception dans l’histoire du club puisqu’il fallait remonter jusqu’au passage de Michel Le Millinaire dix ans auparavant pour trouver telle longévité.

Le Stade Rennais est donc à l’aube du fameux cap dont on entend parler chaque saison, un cap qui est un peu à l’image de ce qu’a su réaliser Lille. Pour le franchir, il faut devenir européen, rester dans les 5 premiers et s’approcher si possible de la 4e ou de la 3e place. Cela permettrait de bénéficier de rétributions de classement plus favorables, et ces fonds sont toujours appréciables pour augmenter les moyens de transfert. Cela permettrait également d’augmenter l’attractivité du club pour les pistes éventuelles comme pour décider des joueurs fortement sollicités, Douchez et M’Vila en tête, à rempiler pour une saison supplémentaire. Mais même sans ligue des champions, le potentiel de cette équipe et sa lente structuration « à la lilloise » permettent d’envisager le futur de manière sereine pour la saison à venir, voire même pour la suivante.

A condition bien sûr de résister cette fois autant que possible à toute « brocante » de fin de mercato.

Par Lauig

3 réflexions sur « L’exemple lillois pour franchir un cap »

  1. globalement d’accord avec cette analyse. Sauf qu’à y regarder de près Lille contient dans son équipe un certain nombre de joueurs techniques que n’a pas le stade rennais. C’est bien là que le bât blesse car c’est la faiblesse récurrente du stade. Bâtir une équipe sur le seul physique aboutit à ce que l’on voit aujourd’hui : des blessés en veux-tu en voilà, des joueurs carbonisés en fin de saison, pas de fond de jeu. Le recrutement de la prochaine saison devra prendre en compte cet aspect technique pour donner un style à une équipe qui en manque cruellement et depuis des années.

  2. Excellent article … Lille mérite le titre pour récompenser cette belle politique sportive et le beau jeu développé depuis plusieurs saisons.
    espérons que Rennes suivra cette voie pour prendre place dans le « Big Four » français …
    Je rêve maintenant d’un recrutement Hamouma, Féret, Roux pour redonner du pep’s à notre attaque …

  3. Entièrement d’accord avec Piécarré. En même temps on peut etre inquiet quand on voit les responsables(ou irresponsables) dirigeants du club vendre 4 attaquants en début de saison .La CFA descend.La france entière nous considère (à juste titre) comme l’équipe la plus chiante à voir jouer. Ou va-t-on?
    Je rejoins aussi Weiser17 dans son rêve de voir Hamouna, Féret et Roux chez nous,
    mais malheureusement ce n’est qu’un rêve et à voir jouer le Hollandais dont j’ai déja oublier le nom, on est mal barré.
    Il faudrait donner les coordonnées de M. SEYDOU à M. LELAY pour qu’il lui explique quelques trucs.

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