« Le derby, 20 ans après ! », par Jean-Marc Mézenge

« Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent connaitre … ». C’était un autre football, un autre « stade », une autre vie.  Le 23 décembre 1990, lors du dernier derby breton du XXème siècle, entre Rennes et Brest, la victoire des rouge et noir, 3 à 0, a ravivé des souvenirs mais aussi  la saine rivalité entre ces deux clubs qui opposaient deux philosophies, deux conceptions : le « foot business made by François Yvinec»  du Brest Armorique FC de David Ginola, Bernard Lama et autres Corentin Martins» et le « Stâde » des frères Delamontagne, François Omam Biyik et du coach Raymond Kéruzoré, véritable icône vivante controversée d’un football collectif qui suintait une connotation politique très marquée. Si je reviens sur cet évènement qui, j’en conviens, date un peu, c’est que j’ai vécu ce moment inoubliable dans un contexte particulier. Adjoint de « Kéru » c’est  assis à ses côtés sur le banc de touche –  enfin façon de parler car Raymond le Zébulon, remonté comme une pendule, faisait le show derrière sa cahute – que j’ai pu, de très près, vivre des émotions que seuls une époque, un contexte et un homme étaient capables de générer chez des milliers de gens,  spectateurs de cette furia rennaise. L’atmosphère était lourde et pesante, et plus qu’une quête de victoire sportive, «  Kéru » avait envie de régler « son solde de tous comptes » avec un Président qui n’avait pas voulu, quelques années auparavant, jouer les seconds rôles à Brest.

Ce soir-là, le spectacle et les symboliques ont, en effet, laissé des traces indélébiles dans les deux camps et, aujourd’hui encore, la mémoire collective est ravivée par des médias qui, tout à coup, ont décidé de réveiller la légende et d’effacer les veilles querelles. C’est une bonne chose car, 20 ans après, il y a prescription et bien des gens, encore au club, devraient s’en inspirer pour construire,  sans rancune,  un Stade Rennais fort d’une identité bretonne qui fera sans doute plus d’effet que de pilonner le « bro Gozh Mazadou » avant l’entrée des joueurs en espérant au miracle identitaire.

Joseph Ernest Renan, qui n’est pas, hélas,  un attaquant moderne, jeune, prometteur, pas cher et inconnu mais qui est un philosophe et historien Français du XIXème siècle, disait : « les vrais hommes de progrès sont ceux qui ont pour point de départ un respect profond du passé ». Notre voisin le Stade Lavallois s’en est inspiré et a fait de cette maxime, une valeur footballistique et fédérative. On peut peut-être aussi s’en inspirer du côté de messieurs Pinault, père et fils, pour franchir cette fameuse dernière marche, tant inaccessible, pour certains sans une caution bancaire illimitée. Qu’ont-ils à perdre ou plutôt à gagner !

Enfin, dans le premier « vrai derby » breton d’un football du XXIème siècle, comme prévu,  Rennes a battu facilement des Brestois, décevants,  dans une ambiance feutrée et édulcorée, laissant les plus enthousiastes pantois devant cette affiche des premiers de la classe. Et quand on interroge les supporters sur « le fait marquant du match », ils relatent presque tous, non sans humour, le coup d’envoi fictif du jeune gamin espiègle, insouciant, et soucieux de réussir l’exploit individuel de marquer un but, volant, par cette pitrerie involontaire (ou pas), la vedette à notre Raymond « Kéru » National qui se délectait à l’avance d’offrir, de l’extérieur du pied droit, une dernière offrande avant de renaitre définitivement au panthéon des druides vivants du ballon rond.

Tout un symbole !

Jean-Marc Mézenge

* Jean-Marc Mézenge est l’ancien adjoint de Raymond Kéruzoré et consultant sur France bleu Armorique.

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